L’importance du suivi de la charge de travail des salariés

L’importance du suivi de la charge de travail des salariés dont le manquement peut être sanctionné sur le fondement de l’obligation de préserver la santé et la sécurité de ses salariés.

Décision de la Cour de cassation du 13 avril 2023 :

Un salarié, engagé en en 2012 en qualité de responsable monde grands comptes est licencié en 2015.

L’intéressé saisit la justice et fait notamment valoir un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité en raison de sa charge de travail excessive et réclame à ce titre le paiement de dommages et intérêts.

Sous prétexte que l’intéressé ne démontrait pas un « rythme de travail important » et que sa responsable lui avait à deux reprises expressément proposé de l’aide pour son activité au cas où il ne serait pas en mesure d’assurer certaines tâches, la cour d’appel rejette la demande.

Pour la cour d’appel, le travail demandé l’était dans « un délai raisonnable ».

D’après les juges, si la responsable lui avait effectivement adressé de nombreux mails pour lui demander d’accomplir des tâches, les délais impartis lors des demandes initiales étaient raisonnables. Et « si les messages étaient adressés à des horaires tardifs ou lors des fins de semaine, ils correspondaient au rythme de travail de sa supérieure hiérarchique et n’appelaient pas de réponse immédiate ».

De plus, l’employeur qui a assuré le suivi médical du salarié, n’avait pas été destinataire d’une information particulière de la médecine du travail.

La Cour de cassation ne voit pas les choses ainsi.

Pour la Cour de cassation, la charge de travail doit faire l’objet d’un entretien annuel.

La Cour de cassation rappelle que « l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. »

Il ne méconnaît pas cette obligation légale dès lors qu’il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail.

Ces mesures, nous dit l’article L.4121-1, comprennent des actions d’information et de formation et la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’article L.4121-2,  quant à lui, liste les neufs principes de prévention qui servent à guider l’employeur dans l’élaboration et la mise en œuvre de sa politique de prévention.

Or, comme cela avait été constaté, « contrairement à ce qu’il soutenait, l’employeur ne justifiait pas avoir mis en œuvre des entretiens annuels au cours desquels étaient évoquées la charge de travail du salarié et son adéquation avec sa vie personnelle. »

 

Dans cette affaire, bien qu’alerté à plusieurs reprises par le salarié sur sa charge de travail et sur son état d’anxiété, l’employeur n’avait apporté aucune réponse à l’intéressé et n’a pris aucune mesure de nature à améliorer ses conditions de travail.

De ce fait, il y avait donc bien eu un manquement de sa part à l’obligation de sécurité.

En conclusion, l’employeur doit s’assurer que la charge de travail du salarié n’est pas excessive et ne porte pas atteinte à sa santé.

L’employeur qui ne justifie pas avoir mis en œuvre des entretiens annuels permettant d’évoquer la charge de travail du salarié et son adéquation avec sa vie personnelle manque à son obligation de sécurité.

Il peut donc être condamné sur ce fondement au versement de dommages et intérêts à son salarié.

l’abandon de poste : une nouvelle forme de démission

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Jusqu’à présent, un salarié en abandon de poste pouvait être licencié par l’employeur, le plus souvent pour faute grave, puis prétendre à des allocations chômage.

Pour contrecarrer cet effet jugé pernicieux, la loi Marché du travail du 21 décembre 2022 a institué une présomption de démission en cas d’abandon de poste par un salarié, ce qui a pour effet de le priver du droit aux allocations versées par Pôle emploi.

Ainsi, un nouvel article L. 1237-1-1 du Code du travail prévoit qu’un salarié ayant abandonné volontairement son poste de travail et ne le reprenant pas après avoir été mis en demeure de le faire et de justifier son absence dans un certain délai fixé par l’employeur est présumé avoir démissionné à l’expiration de ce délai.

Il s’agit d’une présomption simple, pouvant être contestée par le salarié devant le bureau de jugement du conseil de prud’hommes, qui statue sur la nature de la rupture et ses conséquences et ce, dans le délai d’un mois suivant sa saisine.

Le décret d’application était attendu. Il vient d’être publié.

Un décret du 17 avril 2023 précise la procédure de mise en demeure et fixe à 15 jours le délai minimal donné au salarié pour justifier son absence et reprendre son poste après la mise en demeure.

Selon le Ministère du travail, il s’agit de jours calendaires.

L’employeur constatant que le salarié a abandonné son poste et souhaitant faire jouer la présomption de démission doit donc le mettre en demeure par lettre recommandée avec avis de réception ou remise en mains propres contre décharge (si le salarié est absent, nous doutons qu’une remise en mains propres ne puisse intervenir…) de justifier son absence et de reprendre son poste.

Le délai commence à courir à la date de présentation de cette mise en demeure.

À l’issue du délai, en l’absence de réponse ou s’il ne prend pas son poste dans le délai imparti, le salarié est présumé démissionnaire.

Il sera également considéré comme tel s’il répond clairement à l’employeur qu’il ne reprendra pas son poste sans davantage justifier son absence.

Dans ce cas, les règles de droit commun s’appliquent et il est supposé devoir effectuer un préavis de démission mais compte-tenu du contexte, il est peu probable qu’il l’effectue : dans ce cas, l’employeur ne lui devra aucune indemnité compensatrice.

Le Ministère du travail précise que le salarié sera considéré comme démissionnaire « à la date ultime de reprise du travail fixée par l’employeur », c’est-à-dire le dernier jour du délai imparti.

Il semblerait cependant logique de plutôt retenir le lendemain de cet « ultime jour ».

Le décret détermine ensuite les conditions dans lesquelles le salarié peut invoquer un motif légitime susceptible de faire obstacle à cette présomption de démission.

Il reviendra alors au bureau de jugement du conseil de prud’hommes, saisi par le salarié, d’évaluer la « qualité » de la justification qu’il avance.

S’il l’estime légitime, l’abandon de poste sera imputable à l’employeur et produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, justifiant le versement des indemnités de rupture afférentes et permettant le cas échéant au salarié de prétendre au bénéfice des allocations chômage.

Dans le cas contraire, il produira bien les effets d’une démission, privative de toute indemnité et allocation.

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